Contrairement à la délégation, l’indication de paiement ne crée aucun rapport d’obligation entre le délégué et le délégataire. Le fait que l’objet de l’obligation du délégué envers le délégataire soit défini par référence à l’obligation du délégué envers le délégant et/ou du délégant envers le délégataire (délégation incertaine) peut-il être considéré comme une « stipulation contraire » qui rend les exceptions tirées de ces rapports opposables au délégataire ? CRFPA, 2018, Le Commentaire d’arrêt en droit privé, R. Mendregris et G. Vermelle, éd. Le consentement des personnes intéressées à la délégation peut être tout autant exprès que tacite, La Cour de cassation a précisé dans un arrêt du 3 avril 2012 «. Par conséquent, le dirigeant doit donc impérativement décentraliser les pouvoirs au sein de l'organisation de l'entreprise, ce que nous envisagerons dans un second article à paraître. facultaire - Droit privé - Obligations (contrats et responsabilité)] Collections. La question qui alors se pose est de savoir s’il existe une sorte de bénéfice de discussion à la faveur du délégant. En outre, les parties peuvent assortir l’obligation du délégué d’une condition, telle que le respect par le délégant de ses propres obligations envers ce dernier ou dans une certaine proportion. Surtout, les auteurs justifient le principe d’inopposabilité des exceptions en avançant que l’engagement du délégué envers le délégataire est, telle l’obligation cambiaire en matière d’effet de commerce, abstrait. B) Le principe d’inopposabilité des exceptions. À titre de remarque liminaire, il peut être observé que la délégation ne suppose pas le respect de conditions de forme. LexixNexis, 2019, Je veux réussir mon droit – Méthodes de travail et clés du succès, I. Defrénois-Souleau, éd. Pour éviter toute insécurité juridique, le mieux reste encore, pour les parties, de stipuler expressément quelles exceptions sont opposables, et lesquelles ne le sont pas. Les anciennes dispositions relatives à la délégation étaient très lacunaires. Par ailleurs, il ne peut en principe pas refuser le paiement fait par un tiers (V. art. Le principe est l’inopposabilité des exceptions tirées du rapport délégant / délégataire. civ., 24 janv. Droit - Coll. Au regard de ces différentes décisions, il apparaît que, en dehors d’une convention contraire aux termes de laquelle le délégataire renoncerait de façon univoque au bénéfice de l’inopposabilité des exceptions, le délégué ne peut lui opposer les exceptions tirées de son rapport avec le délégant. ». L’indication de paiement consiste ainsi pour un débiteur ou un créancier à désigner une tierce personne quant à effectuer le paiement de la dette. La délégation novatoire a donc pour effet d’éteindre la créance dont est titulaire le délégataire envers le délégant. Le texte ne le précise pas, mais cette règle est très certainement supplétive : il n’existe aucune raison d’empêcher les parties d’y déroger. Si, en revanche, le délégant est titulaire d’une créance de 100 à l’encontre du délégué et que celui-ci s’est seulement engagé à hauteur de 50 envers le délégataire, alors le rapport d’obligation entre le délégant et le délégué subsistera à concurrence de 50. Toutefois, lorsque la délégation est parfaite, soit lorsqu’elle opère novation. Dans un arrêt du 22 avril 1997, la Cour de cassation a estimé en ce sens que «. À la différence de la cession de créance, la délégation n’opère pas de transfert de créance : elle a seulement pour effet de créer un nouveau rapport d’obligation entre le délégué et le délégataire. À cela s’ajoute l’idée qu’il convient de ne pas confondre la cause du droit du délégataire qui réside dans son rapport préexistant avec le délégant et la cause de l’engagement du délégué qui est d’éteindre la dette du délégant. La délégation d’achats. La délégation imparfaite, ou simple, joue un rôle de garantie pour le délégataire : elle lui ajoute un second débiteur (al. Sont ainsi visées par cette disposition les exceptions tirées du rapport délégant / délégataire. LGDJ, coll. Dans un arrêt du 25 février 1992, la chambre commerciale a affirmé «, Ainsi, la chambre commerciale refuse que le délégué puisse opposer au délégataire les exceptions tirées de son rapport avec le délégant, Dans un arrêt du 17 mars 1992 la première chambre civile a pris le contre-pied de la chambre commerciale en considérant que «. précis, 2018, Droit des obligations, Ph. Le mécanisme se rapproche finalement de celui du recours en contribution[4]. La mission de prévention confiée au délégataire serait illusoire si elle ne pouvait s’exercer pendant une période de temps suffisamment longue ou si elle devait être ponctuée … L'IEJ de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne prépare les candidats à l'examen d'entrée au CRFPA et aux concours de l'ENM. 2). La conséquence logique ne peut dès lors être que l’inopposabilité des exceptions tirées du rapport délégant / délégué au délégataire. LexisNexis, 2012, Comprendre la technique de cassation, C. Parmentier, éd. Ex. La raison en est que la créance qui entre dans le patrimoine du cessionnaire par l’effet de la cession, est exactement la même que celle dont était titulaire le créancier cédant. [3] Cass. Par ailleurs, même si le texte ne le précise pas, il semble évident que le délégataire doive respecter un certain ordre : il ne peut exiger le paiement de la part du délégant que si le délégué s’avère défaillant. 1992, n° 90-12.863 : « Mais attendu qu’en cas de délégation de paiement imparfaite, le délégué ne peut, sauf clause contraire, opposer au délégataire les exceptions dont le délégant pouvait se prévaloir à l’égard de celui-ci ». Toutefois, le délégant demeure tenu s’il s’est expressément engagé à garantir la solvabilité future du délégué ou si ce dernier se trouve soumis à une procédure d’apurement de ses dettes lors de la délégation. [4] Il ne s’agit que d’une analogie, puisque le délégant et le délégué ne sont pas codébiteurs, mais sont chacun tenus d’une dette différente vis-à-vis du délégataire, il n’y a donc pas de recours en contribution stricto sensu. LGDJ, 2019, L’essentiel de la méthodologie juridique, D. Bonnet, éd. Il en résulte que, comme prévu à l’article 1336, al. LGDJ, 2020, Cours de droit civil – obligations – régime, F. Zenati-Castaing, éd. LexisNexis, 2019, Droit des obligations, N. Blanc, M. Latina et D. Mazeaud, éd. C’est du moins en ce sens que se prononçait la jurisprudence antérieure et l’ordonnance ne semble pas remettre en cause cette solution. Seube, éd. De plus la possibilité que la délégation de pouvoirs soit « accordée » à un salarié placé dans le bas de l’échelle hiérarchique de l’entreprise et que la subdélégation soit depuis 20 ans reconnue nous interroge sur la protection de ce salarié-préposé aux lourdes responsabilités et à … Elle peut être incertaine et la cause de la délégation doit être trouvée dans les rapports fondamentaux existant entre les parties. L’indication de paiement se rapproche ainsi du mandat de payer qui peut prendre la forme, par exemple, d’une autorisation de prélèvement. Ainsi l’engagement du délégué envers le délégataire est détaché du rapport fondamental qui en constitue la cause. Le débat relatif au principe d’inopposabilité des exceptions tirées du rapport délégant / délégataire a manifestement été tranché par le législateur lors de la réforme des obligations. Mémentos, 2018, Droit des obligations, R. Cabrillac, éd. Cet arrêt semble au premier abord consacrer le principe de l’inopposabilité des exceptions tirées du rapport délégué-délégant, mais la Cour de cassation précise dans ses motifs que cette règle s’applique lorsque le délégué s’est engagé envers le délégataire « sans aucune condition ». Comment rédiger des conclusions en réponse: méthodologie? Dans un arrêt du 13 juin 2006, la chambre commerciale affirme «. Même lorsque la délégation est novatoire, le délégant reste tenu lorsqu’il s’est engagé à garantir la solvabilité du délégué ou lorsque le délégué était soumis à une procédure d’apurement de ses dettes au moment de la conclusion du contrat de délégation (art. Distinction entre délégation parfaite et délégation imparfaite (art. L’intention des parties est donc ici d’éteindre, par le paiement, un rapport d’obligation. On a également une indication de paiement lorsque le créancier indique à son débiteur le nom d’un tiers qui va recevoir le paiement pour son compte. La délégation parfaite étant une forme de novation par changement de débiteur, l’article 1331 devrait entraîner la nullité de la délégation. Lorsque la délégation est simple, elle peut être certaine et alors l'acte est abstrait. ». Tout d’abord, le contrat de délégation n’éteint pas la créance du délégant contre le délégué (al. Aucun formalisme n’est requis, ni pour la validité de l’opération, ni pour son opposabilité aux tiers à l’inverse de la cession de créance par exemple (V. en ce sens les articles 1322 à 1324 du Code civil). LGDJ, coll. Cette distinction est d’origine doctrinale et elle n’est pas consacrée par l’ordonnance, il est toutefois indispensable de la connaître pour comprendre les développements du paragraphe suivant à propos de l’opposabilité des exceptions. Si le délégant est titulaire d’une créance de 100 à l’encontre du délégué et que celui-ci s’est engagé envers le délégataire pour un montant identique, la délégation opère une extinction totale du rapport d’obligation entre le délégant et le délégué. Dans ce cas le principe devrait être celui de l’inopposabilité des exceptions. On opère une distinction entre la délégation certaine et la délégation incertaine. Cette année, l'IEJ forme également les juges consulaires. Dalloz, coll. les avantages et les limites éventuelles de l'attribution d'un statut politique à ces cadres nouveaux et élargis d'expression de la vie collective locale, en formulant des orientations en la matière qui pourraient être proposées comme ligne d'action pour toutes les populations montagnardes. com., 14 févr. Une hypothèse doit enfin être réservée : celle de la nullité de l’obligation du délégant envers le délégataire dans le cadre d’une délégation parfaite. Le paiement a même un triple effet extinctif s’il existait une obligation entre le délégant et le délégataire : dans ce cas, le paiement fait par le délégué au délégataire éteint également cette obligation. [6] Cass. La délégation exige toujours le consentement des trois parties à l’opération, notamment du délégataire qui doit accepter un nouveau débiteur. Manuel, 2020, Droit des obligations, A. Bénabent, éd. ==> La délégation novatoire ou parfaite. Les exceptions tirées du rapport délégué / délégant sont inopposables au délégataire. I, n° 55 : « Mais attendu qu’en exécution du contrat du 25 mars 1948, intervenu entre la société Boisavia et l’Aéro-Club de la Tour-du-pin, conformément à la délégation imparfaite consentie par l’Aéro-Sud-Afrique à cette association, l’obligation à laquelle la société Boisavia était tenue directement envers celui-ci de livrer un avion Mercurey avait pour cause et pour contrepartie la fourniture, effectuée par l’Aéro-Club à l’A.S.A. Lorsque préexiste une obligation entre le délégant et le délégataire et/ou entre le délégant et le délégué, on peut parler d’obligations fondamentales car elles fondent, du moins dans l’intention des parties, l’opération de délégation : le délégant demande au délégué de s’engager envers le délégataire parce qu’il est lui-même engagé vis-à-vis du délégataire et que le paiement du délégué au délégataire le déchargera de sa propre dette contre le délégataire ; le délégué accepte de s’engager envers le délégataire parce qu’il est déjà engagé vis-à-vis du délégant et que le paiement qu’il effectuera au profit du délégataire le déchargera également de sa dette vis-à-vis du délégant. » L’ordonnance semble donc trancher la divergence de jurisprudence en faveur de la solution de la chambre commerciale. Autrement dit, la délégation simple procure deux débiteurs au délégataire. Le droit positif antérieur ne comportait aucune définition de la délégation. 2). Mais depuis la réforme, le Code civil l’envisage comme une opération sur obligation, aux côtés de la cession de créance, de la cession de dette et de la délégation. Il en résulte que le principe d’inopposabilité des exceptions est susceptible d’être écarté, en particulier dans l’hypothèse où, en cas de novation, l’obligation ancienne serait nulle. ATER à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne IEJ Jean Domat. Il en est de même de la simple indication faite, par le créancier, d’une personne désignée pour recevoir le paiement pour lui. Une « action » est un titre négociable qui représente une fraction du capital d’une société. Larcier, 2018, La Méthodologie du Commentaire d’Arrêt en Schémas, M. Bezin et V. Rapp-Cassigneul, éd. De très nombreux exemples de phrases traduites contenant "situation incertaine" – Dictionnaire anglais-français et moteur de recherche de traductions anglaises. Le créancier ne peut donc pas agir en paiement contre le tiers. Dans cette configuration, le délégué s’engage envers le délégataire en considération, Soit de l’obligation préexistante qui le lie au délégant, Soit de l’obligation préexistante qui le lie le délégant au délégataire. Mouly, P. Puig et J.-B. Deux situations doivent alors être distinguées. Le délégué est engagé à titre personnel envers le délégant. Dès lors qu'une entreprise atteint une certaine taille, la multiplication du personnel, des sites d'exploitation, des contrats à conclure vont mettre le dirigeant social dans l'incapacité d'exercer ses fonctions. La délégation est certaine lorsque l'obligation du délégué est nouvelle et totalement autonome. Deux visions de la délégation s’affrontent en doctrine : Par un arrêt du 21 juin 1994, la Cour de cassation a partiellement consacré la vision extensive de la délégation en considérant que l’existence d’une obligation préexistante entre le délégué et le délégant n’était pas inhérente à la qualification de délégation. PUF, 2013, Droit des obligations, B. Fages, éd. Refuser de mettre en place des délégations de pouvoirs entrainera des retards, des approximations et donc une prise de décision à l'efficacité incertaine. Délégation certaine La délégation est certaine lorsque l'obligation créée a un objet autonome par rapport à l'obligation existante. sous Cass. La cause de l’obligation du délégué est alors à rechercher dans ses rapports avec le délégant : Soit il a la volonté de consentir une donation, Soit il a la volonté de consentir un prêt indirect. Dans l’hypothèse où la délégation est seulement imparfaite, soit n’a pas pour effet de décharger le délégant de son obligation envers le délégataire, il est indifférent que l’acceptation de ce dernier soit expresse ou tacite (V. en ce sens. La clause a été consacrée et reconnue par le législateur (voir ancien article 41, alinéa 2 de la loi n° 67-563 du 13 juillet 1967 et … Le délégué est, en effet, susceptible de s’engager à la faveur du délégataire dans le cadre de deux schémas distincts : Au total, il apparaît que l’intérêt de la distinction entre la délégation certaine et la délégation incertaine réside dans l’application du principe d’inopposabilité des exceptions qui, lorsque la délégation est incertaine, peut céder sous l’effet d’une exception tirée d’une obligation préexistante.